samedi 14 mars 2009

Bootsïétique


As-tu pensé François à la raison qui faisait qu'un sport se pratiquant en grande partie avec les pieds soit devenu le sport le plus "populaire" de la planète ?

samedi 15 novembre 2008

Coachdom bien sûr...



Un gros rouquin de 120 kilos, me disait hier en début d’après-midi (autour des verres de vodka marinée qui célèbre la fin d’une séance de systema chez Khosrow) qu’un mec qui avait écrit un livre appelé La semaine de 4 heures, expliquait là sa méthode de travail qui tout en le propulsant premier vendeur de sa boîte l’avait aussi propulsé à la porte de cette même boîte.
Il avait compris que les ventes les plus sûres se passaient entre 8h et 9h du matin et après 18h. Entre 9h et 18h une personne était payée, entre autres, pour filtrer les appels ; avant et après ce créneau, les décideurs étaient directement joignables et peut-être plus disponibles, dans leur fraîcheur matinale, ou moins résistants dans la fatigue du soir. Évidemment les collègues ont compris la combine et au lieu de l’appliquer, car après tout, cela aurait pu devenir la spécialité de cette société (La Société LEVTO ou PROMPTU, une commande entre votre lit et votre vie…), ils se sont plaints à qui de droit, et le malin travailleur s’est fait virer avant que la boîte ne brûle de l’aigreur de ses salariés…

Qu’à cela ne tienne, il n’y avait pas que le travail qui offrait des objectifs et des buts à atteindre : il décida de devenir en quelque mois champion d’une certaine boxe chinoise après avoir observé dans le règlement une règle pouvant lui permettre de gagner un combat sans beaucoup d’expérience : faire tomber trois fois l’adversaire suffisait à l’éliminer.
Il trafiqua un peu son poids (parce que le monsieur s’y connaît aussi en régime à base d‘eau) pour afficher sur la balance 14kg de moins que le lendemain, pour le combat. Il avait appris une seule chose, du moins perfectionné une seule ruse : intercepter les coups de pieds, bloquer la jambe et faire basculer l’adversaire dans cette prise.
Projetés au moins trois fois au sol, les champions de père en fils, les boxeurs de carrière, de famille et de tradition, se voyaient ridiculisés par ce blanc-bec fraîchement débarqué.

La faille qui excite tant ce personnage n’est pas tant celle qui dans les règles lui permet de devenir, un personnage reconnu pour ses manières de faire le moins en gagnant le plus, mais ce que les règles ont de stupides dès lors qu’une d’entre elles permet de les ridiculiser ou de les annuler toutes.
En gros il ne cherche pas à marquer des buts parce qu’accessoirement ça améliorait son score, il exhibe à chaque but la faiblesse de l’objectif, aussi limité que navrant.

Il y a peut-être deux footballs : celui qui consiste à marquer des buts pour ne pas trop perdre la face au classement et celui qui permet de construire des situations propres aux conditions proposées. On pourrait dire que le premier est l’effet du deuxième ou le contraire. Marque t-on pour jouer ou joue t-on pour marquer ?
Ou encore, est-ce que le rôle du but n’est pas juste de valider le bienfait de la phase de jeu, aussi brillante que médiocre ait pu être cette phase ?
En tout cas sans le vouloir, je suis sorti de l’opposition mérite collectif/brio individuel pour entrer dans celles, pas vraiment plus pertinentes, de cause/effet ou moyen/fin.

Je sais qu’une fois, sur un ring, pour un assaut (ce qui est malgré le mot, moins violent qu’un combat), après avoir levé la main de mon adversaire, l’arbitre s’est repris pour me donner la victoire. Largement méritée (non pas du fait d’une supériorité sportive évidente mais d’un désavantage certain de mon adversaire dans son rapport poids/taille), je comprenais pourtant que la victoire puisse aller au tireur d’en face : gagner là, tous seul, quelque chose, me paraissait comme une joie vide, une chose qu’on ne peut partager avec personne. Même si on a été entraîné comme un malade par son entraîneur (ce qui n’était pas mon cas) ou soutenu à fond par sa femme (ce qui ne s’imposait pas vu la modestie du défis), je trouvais que remporter une chose pareille était la plus courte des joies.

Au moment du but, le footballeur ne joue peut-être plus au football, il joue au classement, il joue à autre chose. Il joue à la victoire, il ne joue plus au jeu. Il joue à cette part du jeu qui est celle de le gagner.
Comme tu le disais pour Remi Gaillard, être bon au ballon et bon au foot, c’est pas la même chose.
Il n’y a pas tant opposition collectif/individuel que différence de jeu.

Et l’intérêt du foot, ou d’autres sport sur le même programme (terrain/équipe/ballon/but : surface/groupe/élément/objectif), c’est peut-être ce frottement d’au moins deux choses opposées mais compatibles et complémentaires et qui, a bien y réfléchir, est aussi la recette de bien d’autres programmes dont les régimes contradictoires, paradigmatiques, font tout l’intérêt.

La cocotte, encore appelée « grenade » chez certains puristes - même si la simplicité du dispositif est plus domestique que guerrière (mais nombre de femmes sont mortes à l’époque où les cocottes envahirent l’existence des ménages…) - la cocotte donc est peut-être cette figure de la compression des oppositions footballistiques : un noyau de bonhomme que rien ne distingue (à part des numéros), posté dans la surface de réparation, décide de se disperser brusquement au moment du tire d’un corner. Si un but résulte directement de l’explosion de cette forme, il ne peut qu’être collectif, disons même : résultat de l’unité dispersée du collectif.

À ce moment, une synthèse du football, comme un match accéléré, 90 mn en 5 secondes, a lieu. À ce moment, le football fait du systema…

mercredi 12 novembre 2008

Esteban Cambiasso 2006, Argentine - Serbie : le but idéal ?

une action parfaite comme on en voit peu, ici . Coupe du monde 2006, phase de groupes, l'Argentine est une des équipes les plus agréables à voir évoluer - elle ne gagnera bien sûr pas la coupe, comme si c'étaient les meilleurs qui allaient toujours au bout.

Sur l'action du but, on notera deux phases : une phase, lancinante, peu rythmée, de conservation du ballon. C'est la phase qui demande de la disponibilité collective, mais pas nécessairement de virtuosité technique.
La seconde phase commence par une déviation à une touche de balle, qui déséquilibre immédiatement le bloc adverse, habitué depuis de longues minutes à un jeu de passe posé et latéral. Le déséquilibre est prononcé, et il ne sera jamais compensé, pour la raison suivante : à l'extrême disponibilité collective dont on a parlé s'ajoute d'un coup une prise de risque individuelle sur chaque ballon, facilitée par la qualité technique de chacun des Argentins. Ensuite, on s'engouffre dans les espaces produits du déséquilibre, de manière assez virtuose puisque inattendue et exécutée rapidement. Quand l'inspiration est servie par une technique collective et individuelle forte, le résultat est imparable.

C'est donc à cela que se résume ce but idéal : un système qui permet à l'individu de prendre les risques qui finalement lui profitent, au système. Le bon équilibre entre collectif et individu, finalement ?
On arrive à l'absurdité suivante, dans un monde où l'individu prime : qui louer, pour cette action dite parfaite ? Le buteur, pour son bon appel de balle dans l'intervalle laissé par les défenseur ? Le déviateur, qui déclenche réellement l'action ? Le talonneur ? L'entraîneur, qui rend tout cela possible ? Par facilité ou habitude, on louera donc le buteur - preuve même dans le titre de cet article. Mais c'est regrettable, et on en arrive au point que chaque année, le ballon d'or (récompense individuelle suprême) est remis à un joueur offensif, ailier, avant-centre, buteur. (en 2006, justement, ce ne fut pas le cas : Fabio Cannavaro, défenseur de l'Italie, parce qu'il est d'usage de récompenser un champion du monde l'année de son titre, et que ce n'est pas son attaque qui a fait gagner l'Italie. Comme disait je ne sais plus qui, un match se gagne grâce à l'attaque, un championnat grâce à la défense)

On stigmatise donc le but et le buteur (on ne montre que ça dans les résumés, y comrpis dans les émissions de 'spécialistes'), en arrivant à l'idée préconçue qu'un match se soldant par un 0-0 est forcément un mauvais match, puisque héhé, ya pas eu de but. La finalité du football - le but, qui sanctionne théoriquement une action réussie - se substitue à son essence - le jeu - chez la majeure partie des amateurs de football. On recherche désormais l'efficace, et on tend à accepter qu'une grande équipe, ce n'est plus l'Ajax de Cruyff, qui ne savait pas faire passer le jeu après l'efficacité, mais qui était tout de même efficace, mais c'est un Chelsea ou un Real Madrid, une équipe qu'on reconnaît parce que, je cite, elle gagne même quand elle joue mal. bonjour tristesse.

mercredi 15 octobre 2008

Cher François


Tes QCD (quelques considérations désorganisées) m’ont l’air plutôt bien ficelées et spéculantes. Je n’ai rien à redire, juste ajouter un peu de QCD de plus :

1. Sur les déroutes collectives, déjà.
Les mouvements de foules, grande sœur de la baston générale et muse de la hola, sont toujours des spectacles fabuleux sans cohérence apparente ou avec une telle détermination interne qu’il devient enivrant d’en suivre le mouvement comme seule forme de notre incapacité à en capter le fonctionnement, la magie.
La déroute elle-même est le signe de l’art pour Pierre-Damien Huyghes (le différend esthétique).
La foule et l’anonyme deviennent art avec la photo pour Rancière (le partage du sensible).

2. Un peu plus haut, ce que tu dis du théâtre.
Il est difficile d’établir une économie collectif/individuel lorsque domine encore, comme culture, l’ambition de la réussite individuelle et par là, peut-être se produit, comme un résidus, un « élévement » collectif. Il y a chez Brecht (que je ne connais pas bien) et chez les Straub que j’ai un peu plus vus (toujours en dormant cinq minutes au début comme si effectivement il fallait changer de monde – de système - pour les voir eux et leurs films. Lorsqu’ils sont d’ailleurs, eux-mêmes starifiés dans ce très bon film qu’est Où gît votre sourire enfoui http://www.youtube.com/watch?v=VvFsTjOnrhc, je ne dors pas…), il y a une tentative de mettre en scène des situations où les corps sont (seraient) les supports des idées plus que leur propre manière, il n’empêche, et les Straub activent cette donnée, que la sensualité de chaque corps donne à l’idée ce qui lui manque pour être (et pour être cinématographique). On ne peut que difficilement sortir de l’individu et pourtant : voir 1.

Personnellement - donc avec l’intérêt que ça n’a que pour moi - je préfère le combat à un contre plusieurs ou le geste individuel qui ne repose pas sur l’effort des autres. C’est comme une méfiance mais ce n’est qu’illusoire, on récupère toujours un bout de quelque chose qui ne nous appartient pas : on réfléchit.

3. Ta vision des systèmes comme (anti-)matière première, sol prêt pour fertilisation, surface d’accueil est imparable, c’est l’hypothèse la plus sage, celle de Foucault d’ailleurs, pour autant je ne sais pas si le système est la garantie évidente – la seule - des variations, s’il n’y a pas tout de même de variation en soi, s’il faut toujours une référence… il y a cette phrase du collègue de Mickaël Youn qui disait « si la vie avait un sens on prendrait l’autre », bon d’accord c‘est pas Foucault mais, la phrase questionne la donnée d’un système de base assez facilement…
Il est plus certain de produire des variations à partir d’un système, mais je me demande toujours s’il n’y aurait pas un système perturbé (pertubant/turbulant) qui serait lui-même générateur de variations ? Peut-être alors un système n’est que la première variation.

Passer des heures à causer des variations c’est une variation.

4. Et le corps, l’acteur est le porteur déterminant d’une intention volontaire ou non, par exemple de faire rire ou pas, et à l’intérieur de ce phénomène il est plus sage d’y voir un système, disons un référant, et pourtant la fluidité du passage de l’un à l’autre (position rire, position pas rire) a l’air tellement furtive et déroutante qu’on aurait bien du mal à la faire correspondre à un système… causer des variations.

dimanche 12 octobre 2008

Quelques considérations désorganisées


proposition de départ : le théâtre comme sport collectif. élucubrations diverses.

idée d'équipe, de direction commune ; l'acte collectif (le jeu) met en valeur l'individu (le comédien), qui, même lorsqu'il brille individuellement, sert le but commun (ou du moins il essaie)

Accompagner le porteur de balle, le soutenir. Concrètement, on irait vers une sorte de théâtre total - plus de mouvements individuels, à inscrire dans un mouvement global - collectif.
Difficulté de ce genre de théâtre - déroutant, fatigant. Il s'agit réellement de chorégraphier les mouvements individuels pour ne pas avoir d'action parasites.

L'ensemble, comme système contraignant (une place à chacun), n'existe que pour permettre les permutations et variations nécessaires à provoquer le déséquilibre ; car il en va en football comme en théâtre ou dans tout art narratif ; les ruptures sont essentielles, le déséquilibre est vital, ne serait-ce que pour son effet de surprise (donc spectacle ; dose de surprise et de mystère nécessaire à tout art (Bacon) ; idée de dérouter (faire peur) tout en gardant une cohérence globale nécessaire à la bonne conduction de la narration (émotion, grossièrement, 'faire rire' (1)).
On pense à Kandinsky ("être toujours autre part") ; mais c'est bien le système qui permet la grande efficacité des variations. (On peut ensuite passer des heures à causer de variations, de système, d'équilibre entre les deux, allant jusqu'à par exemple proposer un système de variations, à l'instar d'un Jacques le fataliste).

Enfin, de l'importance du soutien - le Caravage, qui souvent introduisait un personnage-spectateur dans ses compositions, simplement pour mettre en relief la force de la scène, la dramatiser ; et le napolitain partage ceci avec Raimu qui, voulant éduquer un jeune comédien, lui enseigne d'abord un 'truc' pour faire rire la salle sur une réplique précise - inévitablement, le comédien l'utilise, et la salle rit ; le lendemain, rebelote, mais personne ne rit. Sortant de scène, troublé, le comédien demande à Raimu ce qui a cloché - Raimu répond alors que si la salle n'a pas ri, c'est que lui-même ne voulait pas qu'elle rie ; et, par son attitude, il a désamorcé la réplique, truc ou pas truc. C'est dire l'importance qu'ont les regard, positions les plus anodines sur une scène, et leur impact sur les spectateurs ; c'est dire aussi, bien sûr, le talent de Raimu.



(1) "l'art, c'est ce qui fait un peu peur et un peu rire" - Dubuffet. Vision raccourcie d'Eros et Thanatos, donc.

jeudi 2 octobre 2008

un rapide message pour communiquer une nouvelle expression transversale au foot et à l'art : la touche.

en peinture, on parle de la touche du peintre, sorte de signature discrète, remise à l'échelle humaine de la toile.

en football, la rentrée de touche, accordée à l'équipe qui n'a pas sorti le ballon, est le seul moment où un joueur de champ est autorisé à toucher la balle à la main.

On peut bien évidemment dériver ce beau monde et aller voir du côté du verbe toucher (palper, le sens du toucher : important en football comme en art, les sens. On parle également d'un bon touché de balle pour un footballeur), voire du côté de la pierre de touche en architecture.

Emmanuel Kant lui-même, dans un accès de fooiétique incontrôlée, disait "le sublime touche, le beau charme"(1)


et pour conclure, et comme dirait Cyrano, à la fin de l'envoi ... je touche ! (2)





(1) Kant, extrait des Observations sur le sentiment du beau et du sublime
(2) Rostand, Cyrano de Bergerac